Loading...

La vision de PGA est de contribuer à la création d'un ordre international fondé sur le respect des règles pour un monde plus équitable, sûr, durable et démocratique.

Lettre ouverte de Parlementaires en soutien aux défenseurs des droits humains et des journalistes Burundais

This initiative was started by PGA Member, Barbara Lochbihler, MEP (Germany)
This initiative was started by PGA Member, Barbara Lochbihler, MEP (Germany)

Burundi : stop à la violence et aux attaques contre les défenseurs des droits humains et les journalistes

Nous, Membres du Parlement Européen, condamnons fermement les actes de violence à caractère politique et les violations des droits humains commis au Burundi ces derniers mois, en particulier à l'encontre des défenseurs des droits humains et des journalistes. Nous dénonçons l’impunité dont continuent de bénéficier les auteurs de ces attaques. Les vigies de la liberté sont attaquées et menacées au Burundi, à l'image de l'éminent défenseur des droits humains M. Pierre Claver MBONIMPA, président de l'APRODH, victime d'une consternante tentative d'assassinat en août 2015, et qui, forcé à l'exil, n'a pu se rendre à l'enterrement de son fils Willy Fleury Nzitonda, assassiné le 6 novembre dernier.

Les violences contre les défenseurs des droits humains et les journalistes représentent le paroxysme d'atteintes massives portées aux libertés fondamentales, notamment les violations du droit de manifestation pacifique, ainsi que des libertés d’expression, d'association, de réunion et de la presse. Plus de cent défenseurs des droits humains et journalistes ont déjà dû fuir le Burundi. Depuis le début de la crise actuelle, les attaques, menaces verbales et physiques, actes d'intimidation et de harcèlement judiciaire se sont fortement accrus, créant ainsi un environnement toujours plus dangereux pour l'intégrité physique et psychologique de nombreux défenseurs des droits humains et journalistes.

Nous sommes particulièrement inquiets de constater les attaques continues à l’encontre de la société civile de la part du gouvernement burundais et du Président Pierre Nkurunziza, qui, dès son discours d'investiture du 20 août 2015, a assimilé ses leaders à des opposants politiques et à des « malfaiteurs » œuvrant contre l'intérêt de la nation, tout en menaçant de réviser la législation concernant les ONGs, notamment concernant leurs financements. Le lundi 2 novembre, le Président Nkurunziza a lancé un ultimatum à ceux qu’il a qualifié de « criminels armés », les appelant à déposer les armes et à se rendre d’ici le samedi 7 novembre. Cette rhétorique incendiaire et les menaces proférées par les autorités, sur fond de blocage du dialogue politique et de poursuite d’exactions d’une extrême gravité, laissent entrevoir une généralisation imminente de la violence au Burundi.

Nous condamnons avec la plus grande fermeté le rapport de la « Commission chargée de faire la lumière sur le mouvement insurrectionnel déclenché le 26 avril 2015 » qui stigmatise nommément un certain nombre de défenseurs des droits humains[1] ainsi que des journalistes, en en faisant des cibles désignées des attaques des groupes armés.

Le rapport, commandité par le gouvernement, assimile les défenseurs des droits humains à des « organisateurs et responsables » et même des « auteurs intellectuels » de ce qui est qualifié de « mouvement insurrectionnel ». Ce rapport accuse les organisateurs du mouvement et les insurgés d’être entièrement responsables des crimes commis sur les civils et les forces de l’ordre ainsi que d’autres violations. Le rapport affirme en outre le lien étroit « entre les organisateurs de ces prétendues manifestations et les auteurs du putsch avorté du 13 mai 2015. ». Il précise en outre que des arrestations ont été menées a l’encontre de 45 personnes et que d’autres sont recherchées, notamment « tous ceux qui sont repris dans la liste des responsables membres des organisations « Halte au 3ème mandat » et quiconque dont l'enquête révélera qu'il a contribué de près ou de loin dans ce mouvement insurrectionnel […] pour qu'ils soient traduits en justice et répondent des faits retenus à leurs charges »[2].

Nous considérons que tous les actes de harcèlement à l'encontre de journalistes et défenseurs des droits humains, notamment Mme. Gertrude KAZOVIYO, M. Pierre Claver MBONIMPA et M. Armel NIYONGERE, sont des mesures de représailles visant à sanctionner leur engagement et leur travail en faveur de la défense des droits humains.

De plus, nous condamnons dans les termes les plus forts l’adoption par le Gouvernement burundais du décret 530/1597 du 23 novembre 2015, ordonnant la suspension provisoire des activités des dix principales organisations de la société civile burundaise[3]. L’adoption de ce décret est une atteinte intolérable à leur droit d’association et s’inscrit dans le cadre du harcèlement subit par les journalistes et les défenseurs des droits humains depuis la série de manifestations menées par le pays pour s’opposer à un troisième mandat du Président Nkurunziza. Cet ordre de suspension est lié à une enquête sur des allégations d’incitation à la violence ces derniers mois au Burundi, et a par ailleurs été précédé par le gel des avoirs de 9 de ces associations ainsi que des comptes de trois de leurs représentants[4], suite à une lettre du Procureur de la République en date du 19 novembre 2015.

Face à la poursuite de la répression, nous demandons instamment :

  • Aux autorités burundaises de mettre un terme immédiat à la répression, aux attaques, aux menaces et aux actes de harcèlement à l'encontre des représentants de la société civile, journalistes, et défenseurs des droits humains, notamment Mme Gertrude KAZOVIYO, M. Pierre Claver MBONIMPA et M. Armel NIYONGERE. 
  • Aux diplomaties européennes, africaines et onusiennes de peser de tout leur poids afin d'obtenir la fin immédiate de la violence et la mise en place d’un dialogue national qui soit crédible, inclusif et effectif, en conformité avec la résolution 2248 (2015) adoptée le 12 novembre 2015.
  • A l'Union européenne d'assurer que les consultations sur le fondement de l’article 96 de l’accord de partenariat de Cotonou abordent les éléments clés suivants :

– des enquêtes et poursuites impartiales et indépendantes contre les présumés responsables de violations graves des droits humains;

– des mesures concrètes pour la protection de la société civile et des défenseurs de droits humains;

– le désarmement de tous les groupes paramilitaires;

– la libération immédiate de toutes les personnes arbitrairement détenues;

– la réouverture immédiate des stations de radio privées;

– la mise en conformité du projet de loi sur les ONGs avec les obligations internationales du Burundi

– des garanties de respect du droit de manifestation pacifique, et d’un usage proportionné de la force par les forces de défense et de sécurité.

  • A la communauté internationale, y compris l'Union européenne, d'étendre les mesures restrictives (interdiction de visas et gels des avoirs) à l'ensemble de la chaîne de responsabilité des forces responsables des violences actuelles, des commendataires aux exécutants.
  • A la Cour pénale internationale (CPI), et aux organisations internationales chargées des droits humains tels que le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits humains, de continuer de suivre attentivement la situation afin de recueillir les témoignages et éléments de preuves pertinents.

Signatories to date:

  1. Ms. Gabriele Zimmer, MEP
  2. Ms. Barbara Spinelli, MEP
  3. Mr. Xabier Benito Ziluaga, MEP
  4. Ms. Lola Sánchez Caldentey, MEP
  5. Ms. Tania Gonzalez Penas, MEP
  6. Mr. Takis Hadjigeorgiou, MEP
  7. Mr. Fabio De Masi, MEP
  8. Mr. Patrick le Hyaric, MEP
  9. Ms. Marie-Christine Vergiat, MEP
  10. Ms. Merja Kyllönen, MEP
  11. Ms. Martina Anderson, MEP
  12. Ms. Lynn Boylan, MEP
  13. Mr. Matt Carthy, MEP
  14. Ms. Liadh Ni Riada, MEP
  15. Ms. Renate Weber, MEP
  16. Ms. Soraya Post, MEP
  17. Ms. Kati Piri, MEP
  18. Mr. David Martin, MEP
  19. Mark Demesmaeker, MEP
  20. Mr. Petras Austrevicius, MEP
  21. Mr. Charles Goerens, MEP
  22. Ms. Jean Lambert, MEP
  23. Mr. Bodil Valero, MEP
  24. Mr. Ernest Urtasun, MEP
  25. Mr. Ernest Maragall, MEP
  26. Mr. Bronis Rope, MEP
  27. Ms. Maria Heubuch, MEP
  28. Mr. Bart Staes, MEP
  29. Ms. Judith Sargentini, MEP
  30. Ms. Barbara Lochbihler, MEP
  31. Mr. Helmut Scholz, MEP
  32. Ms. Ana Maria Gomes, MEP
  33. Mr. Dimitrios Papadimoulis, MEP
  34. Mr. Jude Kirton-Darling MEP
  35. Ms. Helga Stevens, MEP
  36. Mr. Ignazio Corrao, MEP
  37. Mrs. Mrs Maria Arena, MEP

[1]      Le rapport cite notamment Mme Gertrude KAZOVIYO, secrétaire-générale de la Ligue ITEKA, M. Pierre Claver MBONIMPA, président de l'Association burundaise pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH), M. Pacifique NINAHAZWE, président du Forum pour la conscience et le développement (FOCODE), M. Vital NSHIMIRIMANA, président du Forum pour le renforcement de la société civile (FORSC) et M. Armel NIYONGERE, président de la section Burundi de l'Action des chrétiens pour l'abolition de la peine de mort et contre la torture (ACAT-Burundi)

[2]      Nous sommes vivement préoccupés de voir que ces conclusions ont été reprises par certaines autorités, notamment  par Valentin Bagorikunda, procureur général de la République du Burundi, qui a ajouté que l'émission de mandats d'arrêts internationaux contre les responsables du mouvement insurrectionnel était en cours.

[3] Ce décret concerne l’Action des Chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT-Burundi), l’Association pour la protection des personnes détenues et les droits humains (APRODH), l’Amicale des militaires en non activité (AMINA), le Forum pour la conscience et le développement (FOCODE), le Forum pour le renforcement de la société civile (FORSC), la Fontaine Isoko de la bonne gouvernance pour un développement intégré (FONTAINE-ISOKO), l’Association Maison Shalom (Maison Shalom), Parole et action pour le réveil des consciences et l’évolution des mentalités (PARCEM), le Réseau des citoyens probes (RCP) et la Synergie des partenaires pour la promotion des droits de la femme (SPPDF).

[4] Les associations concernées par le gel des avoirs sont l’ACAT-Burundi, l’APRODH, l’AMINA, le FOCODE, le FORSC, la FONTAINE-ISOKO, la PARCEM, le RCP et la SPPDF. Les représentants des associations concernés sont M. Pacifique Ninihazwe, président du Focode, M. Vital Nshimirimana, délégué général du Forsc et Me Armel Niyongere, président de l’ACAT-Burundi.


 

Resources